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Episode 211 du 06/12/2017: Sur la branche

Stoooop !!!

Sérieux les gars, faut arrêter de vous lâcher comme ça, je n’arrive plus à suivre… En vérité, on dirait la misère qui s’abat sur le monde ! Une proposition minute. Même plus le temps d’aller pisser de peur que l’esclavagisme soit à nouveau légalisé dans l’intervalle.

Donc de quoi qu’on cause aujourd’hui ? Ben du SMIC, forcément. Car après avoir dézingué les chômeurs, les cyniques et les feignants (qui partent aux Bahamas), c’est au tour des smicards de se faire allumer. A croire qu’ils ont une dent contre nous tous, ces Jupitériens. Enfin… Je suis de mauvaise foi parce que ce n’est pas le jeune Macron qui nous a installé le CNNC (Commission nationale de la négociation collective). C’est en 2008, sous Sarko, qu’est née cette petite bande de joyeux drilles qui préconise d’arrêter l’augmentation automatique tous les ans du salaire minimum.

Alors, pour mémoire, le SMIC, c’est 1151 euros et cinquante centimes. A ce niveau-là, c’est important les centimes.

Mais on ne peut pas dire que cela soit très surprenant. Depuis neuf ans, le CNNC – dont l’objectif principal est de décider chaque année s’il faut donner le fameux « coup de pouce » au SMIC – nous répète chaque année que « non, c’est pas super utile ». Ok. Soit.
Ensuite, et dans l’allégresse générale, ils ont dû se sentir pousser des ailes et donc proposer de geler cette fabuleuse manne financière. Après quoi, ils avaient d’autres super-idées comme régionaliser le SMIC ou le moduler en fonction de l’âge ! Tu vois un peu, comme le CIP (le Contrat d’Insertion Professionnel – 1994) qui voulait proposer aux moins de 26 ans un CDD à 80% du SMIC pour mettre un pied dans le marché du travail. Mais là, le coup de la modulation n’est une nouvelle fois pas passé. Sans doute un peu trop tôt. Ils vont le reproposer l’année prochaine, je leur fais entière confiance.

Mais si c’est Zébulon qui nous avait pondu le CNNC, c’est bien par un arrêté de cet été que le Premier ministre a changé quelques têtes à l’Hydre libérale. Et notamment, en nommant Gilbert Cette, président de cette sympatrique confrérie. Lui qui disait en 2013 dans les colonnes du Figaro « qu’au lieu d’augmenter le SMIC, le baisser progressivement serait plus judicieux en cette période où le chômage va de record en record » ajoutant que « le SMIC ne protège pas contre la pauvreté ». Puis en 2015, dans Libé cette fois, le même annonçait déjà la ligne Macroniste à venir en disant : « Le SMIC ne doit s’appliquer que par défaut, en l’absence d’accord de branche. »

Voilà, la boucle était bouclée. Code du travail dépecé, accord de branche.

Euh… celle à laquelle ils veulent nous pendre ?
(dessin de Rodho. Encore. Normal non ?)

Episode 212 du 11/12/2017: En avoir. Ou pas.

Ce matin, j’ai débuté mon avant-dernière semaine de boulot.
J’avoue que ça me soulage. Je suis physiquement à fond de cale. Et puis ces derniers jours, dans les couloirs, je n’entends que des regrets quant à mon proche départ. C’est satisfaisant, on dirait que j’ai bien fait le job. Je ne suis pas la reine du journalisme mais j’ai cette capacité à m’adapter et à offrir professionnellement ce qu’on me demande. Chose que je ne fais pas dans le privé, mais c’est une autre histoire.

Donc bientôt la quille.

Il y a un an de cela, je ruais dans les brancards ! Je n’avais pas de perspective et j’étais morte de trouille… Aujourd’hui ce n’est plus le cas. Bon, je n’ai toujours pas de perspective. J’ai même laissé filer deux annonces qui, voilà douze mois en arrière, auraient fait bander un mort dans le désert nivernais… Mais cette année écoulée m’a appris les limites. Les miennes. Le temps plein c’est plus pour la dame, qui risquerait sinon de finir dans le mur.

Non, ce qui a changé, c’est surtout que je n’ai plus peur. Et ça, ce n’est pas rien. Je temporise, je priorise. Je sais que je vais me démerder. Trouver des solutions, bricoler. Ou pas.

Une chose après l’autre.

Il y a quelques jours en arrière, au boulot, on m’a demandé si je ne pouvais pas rester encore un peu. J’ai répondu non. Que ma vie perso, que les maladies invitées sous notre toit, demandaient ma disponibilité. Je crois que c’est la première fois que je refuse de dépanner. De passer après les autres. Alors ce « non », c’est peut-être le peu de liberté qu’il me reste. J’ai fait et refait les comptes. Comme dirait l’autre : « C’est pas l’enfer, c’est pas le paradis ». Disons que c’est jouable. On verra dans un mois, dans six mois, dans un an.

Une chose après l’autre.

Ce licenciement économique m’aura au moins appris cela. Il peut s’en passer tellement d’ici là ! Je peux recroiser un Kent, rencontrer une autre Pascale Clark. Tout est possible. Ou pas. Je peux réécrire un livre. Qui se vendra. Ou pas. Comme celui-ci, qui finira sans doute par être collector, vu le nombre d’exemplaires vendus. Mais tout ceci n’est pas si grave.
J’avance, un pas après l’autre, n’ayant plus de compte à rendre qu’à moi-même.

J’ai passé l’âge de recevoir des leçons de proches intolérants ou de jupitériens déconnectés. Je trouverai ce putain de mi-temps. Au besoin, je le fabriquerai.
Ou pas.
(dessin du trop regretté Charb)

Episode 213 du 14/12/2017: Cumul 

J’vous jure, je ne voulais pas parler des députés.

C’était trop facile. La bonne dame En Marche qui bouffe des pâtes et qui remonte ses fringues de la cave parce que bon, tu vois, 5000 euros par mois ça fait des fins de mois difficiles… j’allais me faire plaiz à la dézinguer pour pas cher. Trop facile j’vous dis.

Pas d’épisode !

Pareil avec les députés – un qui marche et un socialiste – qui veulent proposer aux élus (et à leurs collaborateurs) dès janvier, des séances de… méditation en pleine conscience. Un programme sur huit semaines, six jours par semaine ! Tout ça pour réduire leur stress. Là aussi, c’était vraiment trop facile. Je me suis dit : « Ma fille, ne cède pas, ignore-les, c’est mauvais pour ta tension, et toi tu fais pas de médiation. » Alors j’ai pris une grande inspiration et j’ai refermé ma page Word.

Pas d’épisode !

Mais pardon… j’ai été faible. Ben j’ai replongé… Le coup de grâce aura été les problèmes de logement de ces pauv’gens. Car sur la totalité des députés, seuls 250 ont un bureau avec « possibilité de couchage » plus 51 chambres disponibles. Forcément, y’en a qui sont un peu SDF… Enfin, ils ont tout de même l’avantage – contrairement aux mecs qui fréquentent le Samu social – d’être remboursés à hauteur de 200 euros par nuit d’hôtel. Mais bon, du coup ça coûte trop de pognon. Surtout s’ils prennent tous des nuitées à 200 boules ! Pourtant sur le, site de Trivago, y’a des hôtels à 50 euros la nuit. Faudrait peut-être leur refiler le tuyau.

Notez que, en principe, le député moyen ne passe jamais sa semaine complète à l’Assemblée. Il n’a pas que ça à faire, non mais oh, et il se doit d’être un peu dans sa circonscription. Donc, disons qu’il dort grand max deux fois par semaine à Paname. Or, leurs frais d’hôtel sont actuellement estimés à… 3200 euros par mois. Je me demande comment ils se débrouillent. Si quelqu’un sait ?

Bref, tout ceci était trop cher, trop compliqué, alors le questeur Florian Bachelier (je vous le donne en mille, qui est LREM) a décidé de modifier les règles dès le 1er janvier. Et ainsi, nos amis les députés pourront désormais louer un logement dont le loyer sera pris en charge par le budget de l’Assemblée nationale… et ce, à hauteur de 1.200 euros par mois !
Et si le malheureux parlementaire – bichette – choisit un appartement dont le loyer dépasse ce montant, ben… le surplus sera remboursé au titre de l’indemnité représentative de frais de mandat.

Heu, c’est quoi la prochaine étape… la prise en charge des maîtresses et de la coke ?
Ah non pardon, j’oubliais : le 1er janvier correspond au début des cours de médiation.

On n’peut pas tout avoir.
(dessin de Rodho qui doit lire dans mes pensées)

Episode 214 du 18/12/2017:  Le père Noël est une ordure

 Telle que vous me lisez, je viens de me servir un petit Monbazillac… Et telle que vous me lisez, je lève mon verre à l’ironie !

Vaut mieux ça que de pester ou de rager. Approchez un peu, prenez un verre vous aussi, que je vous raconte la dernière.

Pour ceux qui suivent, vous savez que depuis 18 mois, je cours après un CDI à Nevers. Et qu’à bientôt cinquante ans, ici dans la cité ducale, c’est pas tout à fait gagné surtout dans mon domaine… Bref, en mars j’avais postulé pour un poste. Mais il m’était passé sous le nez et une jeune femme avait décroché la timbale. Quatre mois après, son employeur me rappelait. La fille en question était enceinte, il cherchait une remplaçante jusqu’au 31 décembre. Allez, c’est toujours bon à prendre…

Depuis août donc, j’ai pris le poste, rédigé mes quatre pages hebdomadaires pour ce journal professionnel, fait des kilomètres à travers le département, bossé parfois le week-end ou le soir. Jusqu’à ce que la jeune femme demande à prolonger son arrêt maternité. Celui qui est devenu mon employeur m’a alors proposé de prolonger mon CDD de deux mois. Sauf qu’entre-temps, la foudre de la maladie s’est abattue deux fois sous mon toit, nécessitant un investissement de ma part plus tout à fait compatible avec cette charge de travail. J’ai du décliner. Et physiquement, fait bien avouer que je n’avais plus franchement les épaules.

C’était il y a un mois. Ils étaient déçus, j’avais fait du bon boulot… « On a peut-être fait une erreur de casting en mars dernier »…

Et voilà que vendredi, le patron me téléphone à nouveau. Finalement, la jeune fille trouve la charge trop lourde, elle aussi. Elle n’a pourtant que trente ans. Peut-être même un peu moins. Elle ne veut plus de ce boulot. Alors si ça me dit, le boss serait ravi de m’offrir le poste, un vrai CDI…

Du coup, je me sers un verre et trinque à l’ironie du sort.
Cette ironie qui me chuchote que je ne suis pas trop branque dans mon domaine, mais que la vie, et l’âge avec, fait que je ne peux pas assumer ce joli CDI avec voiture de fonction et tickets-restaurant. Un CDI à Nevers. Et maintenant ? Ben au bout de plusieurs mois à courir après un temps plein, je vais tout faire pour dénicher un mi-temps tranquille, pas trop contraignant.

Le père Noël est une ordure, la vie aussi.
Ça mérite bien de lever son verre, non ?
(dessin du chouette Deligne)