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Chapitre 3 : Paroles, paroles, paroles…

« La parole est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui écoute. » (Montaigne)

En le raccompagnant à son RER, j’étais vraiment mal. J’avais trop bu. Cela faisait trois ou quatre jours que je n’avais rien avalé de consistant. Trois Cosmo plus tard, j’étais cruellement ivre. On s’embrassa avant qu’il ne s’engouffre dans le tunnel maudit. Il leva les yeux dans ma direction en descendant l’escalator, je ne sais pourquoi, j’ai su d’une façon catégorique et irrévocable, que jamais plus je ne le reverrai. Il avait un regard accablé, tellement sombre.

Si je n’avais pas été aussi souffrante, je l’aurais rattrapé et lui aurait dit « ne fait pas ça ! ». Je voulais le faire, mais c’était impossible tant je n’étais pas bien. Dans le taxi j’ai failli être malade. C’était une horreur. En rentrant chez moi, la première chose que je fis fut de plonger ma tête dans la cuvette des toilettes. Ensuite, je dis à ma fille « je sais que plus jamais je ne le reverrai». Ma fille ria et me dit que vue les derniers jours et surtout, lui qui était comme obnubilé par moi, c’était impossible et que je délirais totalement. Sur ces entrefaites, il m’écrivit sommairement, déjà, imperceptiblement, il avait changé.

Depuis nos premiers échanges, Ryan m’envoyait chaque matin, un SMS de bonjour, c’était rodé comme du papier à musique. Le lendemain matin de notre rendez-vous, aucun SMS de bonjour ne vint me réveiller. Je lui adressai trois messages, aucune réponse. Je tentai de le joindre sur son portable, je tombais irrémédiablement sur sa boite vocale. Mon cœur allait rompre. J’attendis le portable à la main toute la matinée, rien, Ryan avait disparu. La terre se serait ouverte pour m’engloutir, que j’aurais moins souffert.

A bout de nerf et pour sauver un honneur foulé au pied, j’écrivis une lettre que je confiais a un coursier direction son bureau. Je ne possédais pas d’adresse email pour le joindre. Tenter d’appeler son agence et se faire éventuellement jeter par une secrétaire à qui on aurait donné l’ordre de me refouler était tout simplement inenvisageable au regard mon état.

Dans cette missive, je lui dis en substance que je pensais avoir compris même si je ne comprenais rien. Je l’engageais également à ne pas dire des mots d’amour aussi vite car l’amour se construisait lentement. Il était inutile de dire des choses qu’on ne pense pas véritablement pour s’assurer harponner une fille dans un filet inextricable. Enfin, je lui souhaitais une belle et heureuse vie. Dans l’enveloppe, je glissais également un chèque de la moitié de l’addition du bar à Cosmopolitan, cette dernière avait été exorbitante, je ne voulais rien lui redevoir, surtout dans ces conditions pathétiques.

Ce jour-là, je restais toute la journée et nuit devant un portable muet de tous sms ou appels de Ryan. Au petit matin, mes yeux étaient comme exorbités tant j’avais pleuré. Je ne comprenais pas ce que j’avais fait ou pas fait. Comment peut-on changer en quelques heures à peine ? Pourquoi ?

Je me repassais la soirée, les jours d’avant. Je listais tout ce qui aurait pu constituer une raison, un motif pour disparaitre sans mot dire. J’avais même imaginé qu’il avait mal prit le fait que je fus malade à cause des cocktails…Qu’il s’était dit que j’étais une alcoolique pas très rodée. Ou peut-être s’était-il rendu compte que non, je ne mesurais pas 1M80 pour 28 kilos… J’étais devenu mon pire cauchemar, j’étais incohérente et irrationnelle. Je dus attendre encore un peu pour avoir une forme lapidaire d’explication.

Il y eut un mot le vendredi soir. Un SMS qui disait à peu près ce qui suit :

« Bonsoir, excuse-moi pour mon attitude pas très gentlemen. J’ai paniqué, j’ai pris peur. Je cherchais une histoire légère, ta beauté et intelligence en ont décidés autrement. J’ai eu peur de perdre mes enfants pour lesquelles je me suis battu dix ans car leur père a été amoureux comme jamais de sa vie. Je suis perdu. ».

A la lecture de ce sms, j’étais sous le choc. J’ai dû le relire au moins dix fois avant de répondre. Déjà, je ne suis pas de nature vaniteuse. Je suppose qu’à la lecture d’un message de cette nature une autre que moi aurait été plutôt flattée. Moi, je n’aime pas les compliments, ils sonnent faux à mes oreilles. Je trouvais que ses mots étaient comme une mauvaise accroche marketing. Une formule pour une marque de savons ou de rasoirs…J’étais scandalisée, j’étais hors de moi. 

Ensuite, qui lui avait parlé d’abandonner ses enfants ou de les perdre ? Je ne l’aurais jamais suggéré après trois jours, trois ans ou trois vies. Pire encore, un homme qui aurait soi-disant choisi de quitter ses enfants pour moi, se serait retrouvé fort dépourvu, puisque moi, je me serais cassé à la minute même. Ce qu’il ressentait était normal, moi aussi j’avais peur, cela nous était tombé dessus par surprise. Malgré cela, il n’y avait pas matière à fuir, si nous avions une histoire dans le temps, nous trouverions des solutions à tout.

Il se posait des questions existentielles trop tôt. Ce n’est pas après soixante-douze heures qu’on commence à cogiter sur un avenir éventuel. Il faut prendre le temps de découvrir l’autre, de voir si cela n’est pas une simple tocade. Et même si dès les premiers moments on est certains que cela est une histoire sérieuse et que surtout, cela ne change pas dans la durée. Quand on est parent, cela prend du temps pour construire une vie satisfaisante et heureuse pour les enfants. C’est délicat, c’est un profond bouleversement, il faut redoubler de vigilance pour s’assurer autant que puisse se faire du bien-être de tout le monde dans l’équation. Et quand je dis tout le monde, je pense également aux conjoints que l’on laisse. Cela était prématuré de se projeter dans l’avenir, nous devions déjà penser au présent. 

Mais Ryan ne l’entendait pas de la sorte. Pour lui, l’affaire était jugée et sans appel.

Je savais que sa « raison » de s’évaporer n’était pas ses enfants. M’accuser de cela était terrible, car cela était que mensonge. Mais rien de ce que je pouvais écrire n’avait grâce à ses yeux. Il refusait de m’expliquer ce qu’il n’allait pas réellement. Il répondait à côté de la plaque, manifestement, il ne lisait pas vraiment ce que je lui écrivais. Il prenait un temps infini pour répondre, en clair, cet homme qui hier encore me pressait par son assiduité, me traitait par-dessus la jambe.

Le fin mot de l’histoire fut qu’il me « hurla » dessus par sms en m’écrivant « ce n’est pas difficile à comprendre bordel, j’ai presque perdu mes enfants car je suis amoureux de toi ! ». Sur ce, il me communiqua qu’il devait sortir et qu’on s’écrirait plus tard. Plus un mot de la soirée.

Le samedi matin, je reçus un SMS disant « Bonjour, je ne pourrais pas beaucoup parler aujourd’hui, je passe la journée avec mes enfants. Mais cela ne veut pas dire que je ne pense pas à toi. ». Je répondis, par un « parfait, passe une bonne journée avec ta famille ». En réponse je reçus un smiley qui faisait un clin d’œil. En me levant, suite à la vision de cette petite tête rondouillarde et bouffie d’ironie, je pris un café et… un cognac. Ça commençait bien ! Le reste de la journée, pas un mot de Ryan. Le soir venu, un autre SMS arriva pour prendre de mes nouvelles et me renseigner sur le fait qu’il avait une soirée. Je répondis avec la même petite tête rondouillarde qu’il m’avait envoyée plus tôt.

A ce moment précis, je ne savais pas trop quoi faire. Je pouvais laisser les choses en l’état et attendre son bon vouloir. Ou bien, me battre avec les cartes qui m’avaient été données. Laisser les évènements suivre leurs cours, n’aurait rien apporté si ce n’est que cette histoire aurait pris fin en s’étiolant d’elle-même dans le temps. Rien n’aurait été dit, rien n’aurait été fait et avec les jours, il m’aurait de moins en moins écrit et à force, cela serait devenu un grand vide intergalactique.

Victor Hugo disait « La parole intérieure démange. ». Et moi, cela me démangeait de bousculer cet homme pour qu’il comprenne, qu’il ouvre les yeux et accepte d’arrêter avec ses bêtises et surtout, avec ses mystifications. C’est pourquoi j’ai créé un mail, adresse que je lui ai communiquée par SMS et que je lui ai écrit. Dans ce message, je lui dis que nous avions eu une vraie chance que de nous rencontrer. Qu’il gâchait tout. Mais qu’après tout, peut-être cherchait-il seulement une liaison épisodique, j’étais en droit de le penser. Mais s’il avait été sincère, il fallait qu’il sache que moi aussi j’avais peur, mais n’en déplaise, j’étais amoureuse de lui et je ne voulais pas le perdre. Que des histoires comme la nôtre, cela n’arrivait pas tous les quatre matins. Et que ses enfants n’étaient pas en danger. Personne ne le poussait à les laisser pour moi ou nous. Et ainsi, je lui proposais un marché, qu’il prenne le temps de la réflexion, quatre jours. Qu’il pèse le pour et le contre en toute objectivité et avec la plus grande franchise. Et s’il estimait que nous devions donner une chance à la chance, qu’il m’écrive. Sans un mot quatre jours après la lecture de mon mail, je comprendrais qu’il ne désirait pas donner suite.

Il me répondit en me disant que s’il voulait tirer un coup, il ne fallait pas que j’oublie qu’elle était sa fonction. En clair, il était simple pour lui de trouver des candidates à une coucherie grivoise. Ensuite, il me confirma qu’il me répondrait bien avant la date butoir de mon ultimatum avec son cœur et non avec sa tête.

D’après ce que je sais des sentiments humain, à la lecture de mon message, il aurait dû se battre pour moi. Pour ne pas nous perdre. Il aurait dû se dire, « elle ne va pas s’attarder si je continue à la trimbaler, il faut que j’arrête ma fuite en avant. Je tiens à elle, je ne veux pas la perdre ». Moi et mon optimisme légendaire…

Et un autre dimanche plus pourrit que le précédent. Au fil des heures qui me séparait de mon mail de la veille je ne trouvais pas normal qu’il n’ait pas répondu ou appelé. On peut prendre du temps pour analyser des chiffres comptables, pour s’assurer qu’un dossier soit bien ficelé. On est en droit de prendre du temps pour choisir une destination de voyage ou un hôtel. Mais comment expliquer qu’il faille prendre du temps pour savoir si on veut une personne ou pas ? Quand on aime, on n’a pas besoin de réfléchir pour le savoir. On aime ou on n’aime pas. On a soif ou pas, on a sommeil ou pas…C’est aussi simple que ça.

Le lundi, j’ai compris que Ryan n’écrirait pas dans deux jours. Qu’il n’écrirait plus. Que cela faisait quarante-huit heures qu’il ne l’avait pas fait. Que très probablement, il n’en ressentait pas le besoin. Et cela, ce n’était pas de l’amour. C’était je ne sais pas trop quoi, mais pas de l’amour. Logiquement, il aurait dû déjà m’appeler et me dire que nous devions nous voir. Nous nous serions retrouvés, nous aurions fait la paix, nous nous serions expliqués et nous aurions avancé.

C’est pourquoi, j’ai à nouveau écrit. Le ton n’était plus à la romance. Le timbre était désabusé, glacial et synthétique. Je lui dis que tout indiquait qu’il ne comptait plus écrire. En conséquence, vue ma grande compréhension, je coupais les ponts pour lui être agréable et lui faciliter la tâche. Que de toute façon, je n’avais pas pour habitude de courir après les hommes. Que j’étais triste que nous en soyons arrivés là. Mais que je ne voulais pas perdre mon temps ni le sien. Et aussi, je lui demandais de me laisser en paix.

À la lecture de cet email, ma fille me dit, « ne t’inquiète pas, devant la fait accompli il va se secouer, se ressaisir. Il ne pourra pas accepter de te perdre, il va revenir ». J’aurais aimé la croire, mais au fond, je savais que non, il n’attendait que ça finalement. Que je l’aide à en finir. En y repensant, je n’aurais jamais dû lui écrire, j’aurais dû m’abstenir d’envoyer des lettres. Car dans mes correspondances, il ne vit que ce qu’il avait envie de lire. Il ne vit pas l’attachement, le désarroi et donc, la colère.

Avec sa « disparition », je compris plus aisément ces gens à qui on dit « je vais chercher une baguette et je reviens » et dix ans plus tard, la personne partie à la boulangerie n’est toujours pas rentrée. Je comprends le choc que cela fait de rester là, à attendre, vainement. A se dire qu’on ne valait pas mieux qu’une excuse pitoyable pour s’enfuir.

Devant ce drame, car pour moi cela en était un, il me fallait comprendre pourquoi… Pourquoi un homme dit normal, se met-il en quête sur le Net d’une femme. Une fois rencontrée, pourquoi ce mec lui dit-il des mots d’amour et surtout, en voyant que cette femme répond favorablement à ses avances, pourquoi ne profit-il pas de la situation pour au moins coucher avec elle ? Car en admettant que mes copines aient eu raison sur ses motivations, il n’avait pas tenté la moindre approche aussi timide soit-elle. Quelle était l’ultime objectif de cette histoire pour lui ? Que recherchait-il ? 

Je me doutais que je n’arriverais pas à comprendre précisément les motivations d’une personne aussi étrangère, aussi peu familière. Dans les faits, même vingt ans avec lui ne m’auraient pas conféré forcement ce don. Néanmoins, j’étais décidée a tenté de trouver des fondements plausibles et ce, pour ne pas craquer nerveusement.

La seule et unique raison que je trouvais vraisemblable était ma phrase « ne brise pas mon cœur ». Je crois que cette formule le ramena à une vérité. 

J’ai présumé à l’époque, qu’il ne comptait pas et ne souhaitait pas tomber sur une histoire sérieuse. Comme il me l’avait d’ailleurs signifié dans son sms explicatif, il cherchait une histoire « plus légère ». Mais moi, d’après lui, j’avais eu raison de sa volage résolution. Je suppose que cette simple phrase le mit face au fait accompli de ce qu’il était. Un homme qui convoitait une histoire sans grands lendemains. Il avait induit une affaire qui marchait et marchait fort. Il ne s’attendait pas à avoir un répondant aussi criant à ses avances. Ou cela s’arrêterait-il ? Cela devenait risqué.

De tout ceci et dans l’hypothèse de sa sincérité envers moi, une simple conclusion s’instaura d’elle-même. Il n’était pas aussi libre dans sa vie et cœur qu’il voulait bien le faire croire. C’est ainsi, que peu à peu je me suis dit qu’il m’avait sans aucun doute menti sur sa relation avec sa femme.

Je ne savais pas s’ils étaient toujours véritablement en couple. Il était possible que dans sa tête, il était séparé de Madame, mais que Madame ne fût pas au courant de cette désunion. Ou bien, peut-être que Madame savait, mais le « tenait » avec les enfants. D’où éventuellement sa phrase « j’ai failli perde mes enfants pour lesquelles je me suis battu dix ans ».

Cependant, il était également possible que son salut psychologique résidait dans la fuite. Ou qu’il estima que nous étions condamnés par avance. Peut-être ne pouvait-il se projeter dans autre chose que sa vie. Enfin, possible qu’il se dit que « Pour être aimé, je dois être parfait. Si je ne prends aucune responsabilité, personne ne s’apercevra que je ne le suis absolument pas »…Cela pouvait être aussi une forme de pathologie psychiatrique, peut-être souffrait-il d’un trouble de la personnalité narcissique. Il se pouvait pareillement, qu’il dut se volatiliser pour ouvrir une ferme de homards au Pérou ! Que sa vie en dépendait…Allez savoir. 

Une chose était évidente cependant, j’avais comme la sensation qu’il m’avait épargnée. Qu’il estima que je valais mieux quelque part que les autres avec qui, il avait sans aucun doute joué la même comédie. 

Etant Occamienne, j’ai toujours abondé dans le sens du principe de simplicité. Pour moi, la vérité ultime git dans le précepte selon lequel il ne faut pas multiplier les entités sans nécessité. C’est-à-dire qu’il est inutile de chercher une explication compliquée, faisant appel à des principes hors du champ de l’expérience quand une explication simple, à partir de ce que nous connaissons déjà, suffit à rendre compte d’un phénomène qui se manifeste à nos sens.

C’est pourquoi, j’ai balayé d’un revers de la main mes théories sur le pourquoi de ce fiasco avec Ryan et j’ai pris le parti du pragmatisme. Au regard des éléments tangibles à ma disposition, je savais que : J’avais rencontré un homme, nous avions passés d’après moi, trois formidables jours, cet homme s’était dit réellement amoureux de moi, cet homme avait disparu et refusait d’expliquer ses vraies motivations. Voilà, c’était la tout ce qu’il y avait à dire sur le sujet. Pourquoi, comment, à quelle fin ? Je ne le saurais probablement jamais avec certitude.

Ce que je savais par contre, c’est ce qu’il aurait dû faire. Devant une frayeur, une incapacité, un changement d’avis, bref, face à ce qui le poussa à disparaitre, je pense que je méritais un peu de prévenance. Que l’on me dise les choses en face et non par message texte de quelques lignes. Qu’on prenne le temps, pas longtemps, mais le temps de m’expliquer. Il aurait dû avoir un peu de courage. Certes, j’ai planté beaucoup de monde dans des cafés, bars et restaurants après dix minutes. Mais à aucun je n’avais dit des mots d’amours. J’ai toujours eu le plus profond respect pour les sentiments partagés ou non des autres. Et c’est pourquoi, je n’ai jamais trompé un homme, je n’ai jamais quitté sans explication honnête, calme et humaine. Torturer les gens, n’a jamais été mon passe-temps favoris.

Je ne valais pas la peine. Je ne valais pas cette peine que de se donner la peine de ne pas me peiner. Et c’est cela aussi, qui eut un impact considérable sur la suite des évènements de ma vie.

C’est à ce moment qu’un nouveau protagoniste dans l’histoire fait son apparition, enfin, un personnage qui était déjà dans ma vie depuis dix ans, mais qui a sa part dans cette narration. Bugs était l’ami de ma fille. Je l’avais rencontré quand il n’était qu’un enfant. Progressivement, Bugs devint un peu comme un fils pour moi.

Ce dernier, en me voyant dans un désespoir des plus insupportables pour moi et les autres, décida d’écrire à Ryan. Il lui adressa donc un mail quelques semaines après ma dernière lettre. Par une pure coïncidence, j’avais surpris une conversation entre lui et ma fille, il lui faisait part de ce scoop…

J’étais mortifiée, au fond du trou. Qu’allait-il penser de moi. A coups sur, il penserait que cela était un vain stratagème de ma part pour recoller les morceaux d’un épisode que lui avait probablement oublié. Et une fois de plus je dû correspondre avec Ryan pour lui dire que Bugs lui avait écrit, que j’étais désolée, mais que cela n’était pas volontaire, mais uniquement un acte charitable d’un gamin innocent et idéaliste.

Incroyable, mais Bugs reçus une réponse. Mail qu’il s’empressa de me communiquer. Le publicitaire ne comprenait pas très bien, d’après lui, je l’avais sorti de ma vie sans possibilité de retour et sans toutes formes d’explications. Il engageait Bugs à prendre soin de moi, car d’après lui, je le méritais vraiment. Cette dernière formule me donna le sentiment désagréable d’êtres dans une mauvaise publicité de L’Oréal de 2012.

Là, ça en était trop. Je l’avais sorti de ma vie, j’étais responsable ? C’était forcément une farce, une plaisanterie ! Je me décidais à éclaircir certaines choses.

J’expliquais à Monsieur Communication que c’était lui qui avait pris la tangente, qu’il avait disparu sans même m’en avertir et que si je n’avais pas fait quelques démarches pour obtenir un mot de sa part, je serais toujours dans l’expectative. Qu’il avait invoqué un faux prétexte, un alibi se revendiquant de ses enfants. Et s’il était honnête avec lui-même, il savait parfaitement qui avait sorti qui de la vie de l’autre.

Il rétorqua que je n’avais pas voulu entendre parler de ses craintes concernant ses enfants, que j’étais responsable de ce qui s’était passé. Que c’était moi qui l’avais mis face à un ultimatum. Sur ses grands chevaux, il m’annonça qu’il ne s’abaisserait même pas à s’exprimer sur le terrible affront du chèque qu’il avait reçu dans ma première lettre, et que même s’il m’aimerai toujours, l’histoire s’arrêtait là. Et il me demandait de ne plus l’importuner…

Ce dernier échange de mots froids sur un écran, devait solder toute relation entre moi et Ryan. Ou presque… étant donné que quelque semaines après les faits, j’ai pris une initiative inédite pour moi. J’ai saisi mon courage à deux mains et je lui ai écrit sur mon enfance.

J’ai fait ce choix, pour qu’il comprenne qu’une personne avec l’enfance que j’avais connue, n’aurait jamais pu encourager ou cautionner la démolition méthodique d’une relation parents-enfants. En écrivant sur ma jeunesse, je me suis rendue compte que personne en dehors de ma fille ne savait ce que je lui transmettais. Mais cela non plus, il ne l’a pas compris, il ne l’a pas apprécié à sa juste valeur. Je suppose qu’il n’y a vu que la pathétique et désespérée tentative d’une fille un peu bizarre pour réengager le dialogue. Et comme prévu, cela n’eut aucun effet sur ce que Ryan s’était promis à mon sujet.

Nietzsche disait que « La colère vide l’âme de toutes ses ressources, de sorte qu’au fond paraît la lumière. ». Je pense que ce n’est pas la colère, mais le chagrin qui engendre cet état. Cela n’est pas contradictoire, puisque couramment, la colère découle du chagrin. Je savais bien que cela n’apporterait aucune suite, je n’ai d’ailleurs pas écrit pour obtenir un résultat. Je me suis exposée personnellement et aurai-je tout essayé pour que Ryan conçoive ce que pour le coup, Lacan affirmait « L’amour, c’est offrir à quelqu’un qui n’en veut pas quelque chose que l’on n’a pas. ». Et moi, je n’avais plus rien. Rien à perdre, rien à cacher, rien à renier, rien.

Ce fut la, ma dernière correspondance et pour lui, son ultime silence.

A suivre… Le chapitre 4 sera publié le lundi 27 avril 2020

Le chapitre 1 est à retrouver ICI. Le chapitre 2 est à retrouver ICI.

M.G.

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