Harkis, ces intérimaires de guerre !

Aujourd’hui, il est à nouveau question des Harkis et d’indemnisations, le rapport Ceaux dresse une liste de 56 propositions centrées sur la reconnaissance de la responsabilité de la France, les réparations et les enjeux de mémoire. Les représentants des Harkis ont dénoncé un rapport «inacceptable». On les prend encore pour des sots. Aux Harkis, la patrie indécente depuis toujours, bien avant les accords déviants… 60 ans de silence, damnée indifférence ! Jusqu’où ira l’offense ? 

Il y a plus de vingt ans, en lisant les journaux, j’apprenais que des « fils harkis » étaient en grève de la faim…Une longue, si longue grève de la faim, aux Invalides. Ces fils de Harkis ne réclamaient pas d’argent, ni une mesure pour calmer les colères, et atténuer les humiliations, non, non…  Mais un geste symbolique, que la France reconnaisse enfin « sa faute » vis-à-vis de leurs parents et leurs enfants, les Désagrégés de l’histoire, nés et reniés en France.

Il y a plus de vingt ans j’écrivais le poème qui suit. Il est plus que jamais d’actualité !

Fragments sur les Temps Présents,  Une Brève histoire des Harkis, par Abderahmen Moumen, 2 nov. 2008.

Aux Harkis, la patrie indécente !

Arrêtez ! Arrêtez !

Arrêtez de nous tromper
Cessez de nous ignorer,
Ça suffit ! Vous les avez assez abusés.
Leur drapeau est brûlé,
Depuis qu’ils sont devenus vos alliés !
Et, pour toute reconnaissance
Ces années d’indifférence !

Des maux d’histoire passés sous silence
Démocratie à outrance
Enfin, pour les récompenser,
Quelques indemnisations
Pour un lourd tribut versé à votre nation.
Au nom d’une guerre viciée,
Contre une indépendance justifiée.
La Liberté des autres est-elle sans valeur ?
Où est donc votre sens de l’Honneur ?

Souviens-toi, ô grande Nation !
Pour commencer, vous les avez recrutés
Avec bien sûr, un statut dégradé,
Ces « Intérimaires » de guerre que vous aviez créés
En 62, vous les avez  » lâchement  » abandonnés…

Entre-temps, les « Événements » s’étaient compliqués,
Alors, ils étaient devenus plus nombreux,
Bien sûr ! Au premier rang pour essuyer les feux.

Avec le temps, la situation s’était enlisée,
Mais à vos côtés, ils se sentaient protégés
Eux et leur famille
Après les accords d’Évian, ils étaient menacés
Eux et leur famille
Il fallait donc les  » rapatrier  »
Eux et leur famille

Mais, ils ne faisaient pas vraiment partie de votre armée !
Alors, vous vous êtes détournés
D’eux, ô infamie !

Pendant le discours de vos officiers
Vos Soldats les ont lâchement désarmés !
Votre dos vous leur avez montré
Leur vie, le FLN s’en est chargé,
Sont-ce là les valeurs de votre Démocratie ?
Qui les a laissés ainsi sans merci !

Des milliers de morts
Et puis… quelques remords ?
Après que L’ONU vous a sermonnés,
Ou fut-ce un sursaut d’Humanité ?
Alors, vous les avez  » Expatriés « ,
Enfin, une petite moitié…

Surtout isolés de votre population
Anciens camps de prisonniers
Ou casernes désaffectées
État d’urgence ! Solution transitoire
Loin des feux, ils se sentaient mieux
Sous les tentes provisoires
Renaissait l’espoir
Ils avaient tout perdu, sauf la vie ?

Ces réserves gérées comme des prisons
On en sort avec autorisation
Sinon, il y a aura des sanctions !
Parfois même des expulsions !
Une autre traversée de la mer
Vers la mort… pour trahison !

Enfin, pour ces « Apatriés  » qui y sont restés
Les camps se sont éternisés
L’attente un an, deux, puis dix…
En troupeau, des familles étaient déplacées,
Là, où la main-d’œuvre était demandée
Moins que des animaux, ils étaient considérés
Comme des prisonniers, ils étaient surveillés !

Alors, pour un minimum de dignité
Et lutter contre cette fatalité,
On les avait oubliés… !
Ils se sont révoltés.
Tout allait changer ?
Après les grèves de la faim
Ce cauchemar prendrait fin ?
Non, Encore des promesses sans lendemain
Des mesurettes, tendez vos mains !
On n’échappe pas à ce destin !

Surtout ne plus  » Vous croire, ne plus espérer  »
Vous les aviez suffisamment abusés !
Autres grèves, autres manifestations,
Et, toujours les mêmes revendications
Que les gouvernements continuent de négliger,
Et, les médias à peine à évoquer !
 » Les Harkis, on connaît pas !  »

Si longtemps rejetés et bannis
Par Leurs deux pays
Nous, les enfants de Harkis
Nous sommes venus vous réclamer
Des excuses pour votre Inhumanité.
Arrêtez, arrêtez de nous ignorer
Maintenant, il faut parler !

O Harkis, vous aviez des droits
Et, la France des devoirs…
Dont celui de la mémoire.

Dr Black-Arum