Ion Zion est une mère de famille, célibataire, avec quatre enfants. Elle a beaucoup voyagé et vécu un peu partout. La cité, la Martinique, les favelas. Polyglotte et nourrie de nombreuses cultures, elle aime les gens et a envie de partager. Ion Zion a aussi connu des hauts et beaucoup de bas. Et en ce moment, c’est la galère. Le dessin, elle l’a appris « comme ça » : « J’ai su dessiner avant de savoir écrire et j’ai toujours communiqué par le dessin ». Pour Ion Zion, le dessin est comme un exutoire, un moyen de « vivre mieux » et de « dire les choses ». « Je ne dessine pas pour rien, chaque dessin est un cheminement ». A travers cette chronique, Ion Zion nous fait découvrir ses univers et ce qu’elle a à dire : « l’autre côté du décor dans les îles françaises, la justice qui est faite pour les riches, une société qui nous tient par la peur …« 


Mon fils Yuri, 15 ans, vous fait partager à travers ce texte son souvenir d’un week-end à Paris avant la pandémie de Covid. Il vous transmet du haut de ses 15 ans sa nostalgie et évoque ce qu’il aimerait retrouver. Il a dessiné ce qu’il aime « des trucs rigolos »

Balade nocturne un soir d’été dans Paris

Accoudé à la balustrade de mon balcon, contemplant la nuit descendant sur Paris, l’air tiède de l’été et des rumeurs de fête non loin me donnait subitement l’envie d’une promenade dans le coeur animé de cette belle capitale. Je partais en direction du Centre Pompidou, voir les artistes colorés et les musiciens enflammés, sentir l’odeur du bonheur et la frénésie des touristes ébahis.

J’arrivais sur cette place bondée comme la scène d’un théâtre à ciel ouvert ayant comme décor ce musée dont la lumière fusant des tubes, comme un feu d’artifice figé dans le temps, explosât en moi comme une impression de bien-être et laissait mon esprit s’évader avec la musique presque éphémère. Le temps passant, l’ambiance commençait à se calmer, la musique s’atténuait, les spectateurs lassés des répétions des numéros des artistes commençaient à se disperser et à quitter lentement la Place Beaubourg.

À mon tour fatigué, ayant besoin de changement, je décidais de suivre le mouvement de la foule et quittais ce lieu de fête et de troubadours modernes pour prendre le chemin de la place du Louvre. Me baladant le long des trottoirs, observant les passants tenant difficilement sur leurs jambes sortant des cafés tapageurs et éclatants, aux rires et aux éclats de voix bruyants, je croisais un groupe hilare et alcoolisé sentant les derniers verres d’alcool d’une soirée apparemment trop arrosée.

« Les yeux scintillant d’émerveillement , la tête inondée d’étincelles »

Je traversais la rue pour me retrouver devant l’entrée du Musée du Louvre où j’aperçus, magistrale, la pyramide dont l’éclat lumineux précisait les contours de son ossature métallique reflétée dans les eaux des bassins l’entourant. Comme un effet d’optique, le vent faisait danser ses lumières fauves et aquatiques comme un bal sauvage. Je restais hypnotisé par cet étrange spectacle. Les yeux scintillant d’émerveillement , la tête inondée d’étincelles comme saoulé de lumière je voulais me reposer l’esprit dans un endroit calme et silencieux.

Quelle chance ! Le jardin des Tuileries est juste là, à croire qu’il n’attendait que moi en cette douce soirée. J’arrivais à l’entrée de ce jardin, heureusement resté ouvert en cette période de l’année. Je m’asseyais donc, sur un banc, seul au milieu de cet endroit désert, comme un silence m’écrasant le dos et contemplant maintenant calme, le grand bassin juste devant moi reflétant la mine blafarde de la lune. Soudain, dans le noir de cette nuit faiblement éclairée par un triste lampadaire, un vieil homme avec un air désolé, apparu à côté de moi, semblant se promener tel un fantôme errant dans ce jardin rempli d’une lumière subitement voilée et fixant à chaque pas, chaque fleur déjà presque brûlée par la chaleur de l’été.

Je me mis à le dévisager, me sentant protégé de mon impolitesse par l’obscurité : il portait un feutre mou beige, une veste et un pantalon d’une couleur indéfinissable, délavée par le temps, un nez de corbeau sortait sous son chapeau entouré d’une chevelure blanche et ébouriffée dont les pointes semblaient affinées par du gel. Son visage carré et ridé, ses yeux noirs presque inertes, lui donnait une allure de centenaire fantomatique, il tenait dans ses mains noueuses une canne, qui elle aussi n’avait plus d’âge; c’était comme si le temps l’avait abandonné. Cette vision me glaçât le sang et me poussât à partir d’un pas inquiet et pressé vers les lumières accueillantes de la Place de la Concorde.

« Vers les lumières accueillantes de la Place de la Concorde« 

Je sortais donc, vite du jardin par la sortie en face du Musée d’Orsay endormi, pour me retrouver d’un coup sous les lumières aveuglantes, le bruit des voitures secouées par les pavés et les passants discutant dans toutes les langues autour de moi. J’étais Place de la Concorde, entre les ambassades, les dorures du pont Alexandre III, les fontaines scintillantes et surtout, l’obélisque, précieux cadeaux ramené d’Egypte ornant cette mythique place. Le spectacle de l’obélisque avec en arrière plan la grande roue de la fête foraine illuminée comme un sapin de Noël, lucioles multicolores, me ravit. Tournant la tête, je vis l’immense avenue des Champs Élysées bordée de chaque côté d’arbres, éclairée par les lumières des boutiques, cafés, restaurants et hôtels que l’on devinait, et en son milieu la masse de véhicules circulant, klaxonnant où seuls des petits feux rouges ou blancs clignotaient me faisant penser à une danse de phares électriques.

Au fond, là-bas, tout au loin, l’Arc de Triomphe, orné de son drapeau tricolore semblait contempler cet étrange circulation cacophonique de manière impassible et intemporelle. Quel spectacle !!!

Enfin, fatigué d’avoir erré dans ces rues mouvementées, ma conscience me dit de rentrer chez moi.

Je pris donc le chemin du retour.

Texte et dessin de mon fils Yuri, 15 ans.

« TRUCS et BIDULES POUR UN QUOTIDIEN RIGOLO » – ©Yuri

ION ZION (à retrouver aussi sur Facebook)

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Porte-voix-BLEU-seul-300x258.jpg.

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