Ion Zion est une mère de famille, célibataire, avec quatre enfants. Elle a beaucoup voyagé et vécu un peu partout. La cité, la Martinique, les favelas. Polyglotte et nourrie de nombreuses cultures, elle aime les gens et a envie de partager. Ion Zion a aussi connu des hauts et beaucoup de bas. Et en ce moment, c’est la galère.
Le dessin, elle l’a appris « comme ça » : « J’ai su dessiner avant de savoir écrire et j’ai toujours communiqué par le dessin ». Pour Ion Zion, le dessin est comme un exutoire, un moyen de « vivre mieux » et de « dire les choses ». « Je ne dessine pas pour rien, chaque dessin est un cheminement ». A travers cette chronique, Ion Zion nous fait découvrir ses univers et ce qu’elle a à dire : « l’autre côté du décor dans les îles françaises, la justice qui est faite pour les riches, une société qui nous tient par la peur …«
J’ai fait ce dessin à l’occasion d’un concours pour une école d’art-décoratif. L’inspiration est venue avant le concours, alors que j’attendais sur un banc : un homme s’est assis à côté de moi. Il s’appelait Tierno et m’a raconté qu’il arrivait du Mali, qu’il avait laissé sa femme et ses enfants au bled, qu’il essayait de les faire venir, mais « avec vous, les Français, c’est pas facile les papiers ». Il travaillait dans un restaurant à la plonge.
Cette rencontre m’a inspiré ce dessin, que j’ai réalisé quelques instants après dans la salle d’examen. Je me souviens surtout qu’il ne répondait absolument pas aux consignes reçues ! Malgré tout, j’ai été prise. Mais je n’ai pas pu suivre les cours en raison des problèmes que je vivais à cette période-là.
Cette rencontre me donne aussi envie de parler d’exode.
J’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour les personnes capables de tout quitter pour sauver leur vie et celle de leur famille.
D’abord parce qu’à la douleur de vivre mal dans le pays où l’on est, quelle qu’en soit la raison : guerre, famine…. il y a aussi la douleur de l’abandon : devoir abandonner sa maison, son travail parfois, ses amis, pour simplement, dans un ultime sursaut de survie, se sauver et essayer de sauver ceux qu’on aime.
Il faut ensuite partir, marcher, traverser des lieux hostiles, dangereux, accrochés à cet espoir incroyable qu’ailleurs sera meilleur… et beaucoup n’arrivent pas au bout du chemin.
Et malgré sûrement le doute, la fatigue, la faim, ils avancent…..c’est inexorable : les populations migreront, acceptons-le !
« AIDER, C’EST AUSSI SE SAUVER UN PEU SOI-MÊME ET S’OUBLIER… »
Il y a aussi cette chanson de Maxime Le Forestier « ÊTRE NÉ QUELQUE PART » qui tourne souvent dans ma tête :
« On choisit pas ses parents,
On choisit pas sa famille,
On choisit pas non plus les trottoirs de Manille de Paris ou d’Alger pour apprendre à marcher
Être né quelque part….. »
Et quand j’entends ce que j’entends ou que je lis ce que je lis, quand il s’agit des migrants que les États gouvernés par des gens soi-disant intelligents traitent comme des chiens en toute bonne conscience avec l’assentiment de certains, je ne sais pas si je dois crier ou pleurer.
On ne crache pas dans une main tendue, j’ai été élevée comme ça : on accueille, ce n’est pas une question d’argent, mais juste d’un peu de chaleur humaine, juste avoir ce sentiment qu’on n’est pas simplement des bêtes à deux pattes mais des humains. Aider, c’est aussi se sauver un peu soi-même et s’oublier… C’est pour ça qu’il y a toujours eu le couvert du voyageur chez nous et je perpétue cette tradition familiale…
ION ZION (à retrouver aussi sur Facebook)
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