La République aujourd’hui semble être une tour de banlieue. Un lieu de vie mal entretenu, que certains penseraient même dépassé, voué à la démolition. Mais pourtant elle tient encore a peu près debout et il y a de la vie à l’intérieur. Elle peut servir. Faudrait-il un coup de peinture ou une végétalisation de la façade ?
Les habitants ont bien conscience que le problème est au-delà, qu’il faudrait investir en profondeur. Ce n’est pas une aire de jeux pour les enfants en bas qui apportera non plus la solution. En fait, il faudrait d’abord remettre de la lumière dans les escaliers et du chauffage correct dans les foyers. Il faudrait réparer le foutu ascenseur social qui est en panne depuis un bon moment. Et puis soyons fous comme l’ont été certains architectes, notamment celui que les Marseillais appelaient le Fada ( Edouard Jeanneret dit Le Corbusier), il faudrait y créer des espaces communs, des circulations horizontales, des buanderies communes, des salles de jeux ou des crèches intégrées. Bref, une Cité radieuse. Et soyons encore plus fous, il faudrait peut-être même mettre des tours à la campagne. Du point de vue écologique, mieux vaut un immeuble à la campagne avec un chauffage commun efficient, avec un grand jardin partagé plutôt que 20 maisonnettes multipliant les nuisances et l’occupation de l’espace. Il faut que tout le territoire vive.
nous avons aussi besoin de folie et de rêve.
Pour que vive la tour, nous avons certes besoin d’investissement, mais nous avons aussi besoin de folie et de rêve. Nous mourons de raison budgétaire et d’économies de-ci de-là, on rogne, on ronge, on supprime. Ce mal est-il français ? Non il est européen avant tout. Un pays aussi fier de sa réussite économique que l’Allemagne, substitut à toute velléité de puissance guerrière, se rend compte subitement qu’il n’est qu’une vieille tour de banlieue mal entretenue. Les trains ne circulent plus correctement, c’est un sujet de plaisanterie nationale. Les Autobahn ont des chaussées défoncées, marcher sur un trottoir d’une ville allemande revient à trébucher sur du vieux pavé disjoint. La queue chez le médecin s’allonge également, on s’inquiète. Et enfin, on comprend que l’ère de la voiture du peuple pour tous est en train de s’éteindre.
Le mal est commun, la cause est commune, le péril qui guette au final l’édifice est identique. Il s’appelle l’extrême-droite.
Ce n’est pas d’un gardien ni d’un meilleur gestionnaire dont nous avons besoin, c’est de remettre du contenu et du rêve dans la République qui reste une construction féconde. Il faut briser le carcan dans lequel sont enfermées les politiques publiques, il faut arrêter d’emprunter sur les marchés pour être soumis à leurs désiderata, il faut abolir les règles communes qui nous étouffent et dont personne ne trouve exactement la justification originelle. Bref, pour notre tour, pour notre prochaine République, car celle-ci est en bout de course, il nous faut des efforts collectifs et un sacré grand architecte, un Fada quoi !
Laurent PIOLET
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