A la lisière d’un bois, coulait une rivière. Son niveau était au plus bas. C’était la fin de l’été, le court d’eau était presque à sec. Un filé d’eau s’écoulait encore, résistant d’un été caniculaire. Les berges étaient bien à nu, nous pouvions même apercevoir les racines apparentes des arbres fixées sur les flancs des terres érodées par ce liquide qui ne cesse de coulait tout au long des années.
Mon regard fixait ainsi le courant et voyait divers objets emportés par le courant, comme des brindilles, des feuilles qui commençaient à tomber des arbres bordant cette rivière, annonçant ainsi le début de l’automne. Parmi tout ce qui défilait, ma vision fut attirée par une feuille plus jaune que les autres. Et mes yeux se mirent à suivre ce végétal mort emporté par le mouvement du ruisseau.
Elle passait devant moi, percutait les gravillons qui formait une plage sur laquelle j’étais assis. Elle tournait sur elle-même, comme si elle voulait s’arrêtait, comme si elle voulait survivre, d’une fin certaine que la vie allait emporter, et lui donner une mort inévitable. L’impression était celle d’un combat entre un semblant de vie et un temps qui passe.
Mon esprit était alors emporté, et je me mis à comparer cette feuille à mon vécu. Pris dans un chagrin d’amour dont je n’arrivais à m’extraire, mes pensées tournaient en boucle, comme cette feuille. Le courant était cette vie qui défilait à chaque seconde, que je ne pouvais stopper, et cette feuille, reste d’un arbre solide et fort, était un amour que j’avais perdu, qui n’était plus qu’un souvenir, et pourtant qui avait existé.
Il n’en restait qu’un morceau, posait à fleur de l’eau, sur la surface. Le chagrin m’envahissait, car impuissant, je ne pouvais arrêter ce temps qui défilait, je ne pouvais non plus tenter de récupérer cette feuille jaunis par le changement de saison, qui annonçait le début d’un hivers rigoureux car la chute des arbres de ces feuilles était bien précoce cette année.
Alors mon cœur se serrait, car l’évidence se présentait à ma conscience, tout était bien les signes de la fin éternel, celle d’une histoire qui était et qui ne se refera plus jamais, qui n’existera plus. Il me restait encore des souvenirs auxquels je m’accrochais comme si j’entrais dans un déni, une négation dernier espoir de sentiments si fort et si vrais, que je pensais infini et sans fin.
J’avais beau me torturer l’esprit, tout basculer dans ma tête, tout retourner, le maximum était fait, plus rien ne pouvait sauver cet amour, il était mort, bientôt disparu, comme cette feuille qui coulait, et qui allait décliner au prochain tournant, au prochain virage de la rivière.
Il me restait une dernière larme qui sortait de mes paupières et qui coulait sur ma joue, pour finir par s’écraser sur les galets de cette plage. Seul l’acceptation restait présente, et même si je la refusais, même si je luttais contre elle, elle s’imposait, de fait, comme chaque battement d’un cœur se réalise sans que nous en soyons conscient, marquant ainsi un rythme, celui de la vie. Cette vie qui se stoppe quand le rythme cardiaque cesse d’exister.
Au final je suivais encore de loin cette feuille qui devenait de plus en plus petite au fur et à mesure qu’elle s éloignait, pour au final disparaitre, derrière un virage. J’eu alors un soupir de désolation. Mon regard se replaçait devant moi ensuite, je revoyais encore d’autres feuilles dans la même situation, mais celle qui avait attiré mon attention restait unique, je ne sais pourquoi. Peut être qu’elle avait croisait de son passage des pensés qui me traversaient l’esprit à ce moment-là, et qui correspondaient à un état d’être unique que jamais je n’aurais plus.
Ainsi ma vie s’effaçait à chaque seconde un peu plus à chaque instant que je vivais, que j’étais de plus en plus fatigué de lutter contre des épreuves affectives auxquelles au final il était inutile de croire.
Yann – Reims