Pour concilier fin du monde et fin du mois, rien de mieux que la low-tech : un mode de vie sobre en énergie et en matières premières, qui permet de respecter l’environnement tout en faisant de substantielles économies… sans renoncer au confort !

Fin du monde, fin du mois, même combat”, la formule de Nicolas Hulot résume LA question du siècle : comment articuler enjeux sociaux et environnementaux ?

On ne peut rendre l’écologie “populaire” si elle crée des inégalités. Cas pratique : la taxe carbone. Taxez l’énergie afin de pousser la population à la sobriété, mais sans fournir d’alternative accessible, et vous aurez une révolte (coucou les gilets jaunes !).

Heureusement, il y a l’alternative low-tech !

Des technologies simples, peu gourmandes en énergie et plus respectueuses de l’environnement. Une démarche qui favorise le multi-usage, le réemploi, le recyclage, mais aussi une plus grande autonomie en énergie et en nourriture.

En cela, la démarche low-tech émerge comme une réponse concrète pour concilier la fin du monde, en termes de crise climatique, et la fin du mois, en termes de pression économique sur les ménages.

Les high-tech coûtent trop cher à la planète, comme aux consommateurs !

Multiplication des écrans et des abonnements, méga-frigo, robots ménagers, vélo électrique, domotique… les high-tech coûtent cher à l’achat et pompent beaucoup d’énergie, pour un gain de confort faible. Pire : la plupart des “green techs” qui visent à réduire nos émissions de CO2… les augmentent ! On appelle ça “l’effet rebond” ou le paradoxe de Jevons.

Pourtant, à force de matraquage publicitaire (et politique), de soldes et de subventions, on nous fait croire que “c’est génial, c’est le progrès” (et vice-versa) ! Un exemple : la voiture électrique. Tout est fait pour que les classes moyennes se ruent sur les S.U.V électriques. Des mastodontes d’acier, de plastique et de micro-processeurs made in Asia, soit disant “zéro émission” alors que leur cycle de vie émet un maximum de gaz à effet de serre, entre les pneus énormes, les routes à entretenir, les bornes à installer, les centrales nucléaires à construire fissa, les super-tankers venus de Taïwan, les cimetières de batteries non-recyclables, etc…

Je pense enfin aux supermarchés : des lieux high-tech s’il en est, bourrés d’éclairages néons, de frigos, de caméras, de scanners, d’écrans, de machineries, et qui exige une logistique ultra-complexe. Des grands distributeurs régulièrement dénoncées par les associations de consommateurs pour se payer des marges sur le dos des producteurs ou des clients.

Et je ne vous parle même pas des applis (genre TikTok) et des jeux vidéos qui vous manipulent par la publicité ou les micro-achats compulsifs et vampirisent votre compte bancaire (pour en savoir plus sur le sujet, rendez-vous ici) ! Elles ont le bras armé de la fast-fashion, type Shein ou Primark. Vous pensez acheter des vêtements pas cher… En réalité les économies que vous faites sur votre achat, vous les payez au centuple par le réchauffement climatique ou la perte de biodiversité liée aux impacts environnementaux de cette surproduction industrielle !

Passer en mode low-tech est une véritable opportunité de rompre avec ce techno-cocon, avec notre dépendance aux high-tech polluantes, énergivores et coûteuses, en privilégiant des réponses simples, accessibles, économiques à nos besoins essentiels.

Énergie, eau et alimentation : plus d’autonomie, moins de pollution et de dépenses.

La “philosophie du moins” est au cœur de la démarche low-tech. Elle consiste à chercher la réponse à un besoin réel qui soit la moins consommatrice d’énergie, de matières premières… Et donc la moins coûteuse. C’est ainsi que la low-tech concilie fin du monde et fin du mois.

Mais, pour cela, il faut vouloir dire non à certains diktats de la société de consommation… Et dire OUI à un mode de vie différent.

Oui, je peux être “propre” sans utiliser 5 produits d’hygiène. Oui, je peux être confortable dans une maison chauffée à moins de 19°C. Oui, je peux bien manger sans remplir mon frigo de produits exotiques. Oui, je peux faire pousser tout un tas de légumes dans mon salon ou sur un petit balcon. Oui, je peux me passer de viande sans risque pour ma santé. Oui, je peux avoir une vie culturelle sans dépenser beaucoup d’argent (en privilégiant les médiathèques). Oui, je peux avoir une vie sociale épanouie sans réseaux sociaux. Oui, je peux avoir une garde-robe de qualité et diversifiée sans me ruiner (en achetant d’occasion, en réparant, en fabriquant moi-même). Oui, je peux partir en vacances sans voiture, en utilisant le train et le covoiturage (en voyant le voyage non plus comme la destination, mais le chemin).

Et je ne suis pas là dans des “petits gestes”, mais bien dans de grands gestes qui changent votre mode de vie : ne plus aller au supermarché, être le moins souvent possible seul au volant de sa voiture, dégoogliser sa vie (en utilisant d’autres services), se désabonner des plateformes de streaming (la médiathèque a des DVD et des livres), ne conserver qu’un réseau social… Tous ces gestes vont clairement changer votre mode de vie, que vous soyez riche ou pas.  

Mais tous ces changements exigent des efforts. Efforts qui sont considérés comme une régression dans le discours “solutionniste” et “presse bouton” de la société de consommation. Combien de fois a-t-on lu ou entendu une pub vanter le “sans effort”. Le regard des autres sera dur à encaisser.

Une question d’imaginaire

C’est là que l’on se cogne au mur des imaginaires.

On va lâcher le mot : renoncement. C’est celui qui fait penser que l’écologie c’est pour les bourgeois-bohèmes. Quand on mange de la viande qu’une fois par semaine, on a pas envie de s’entendre dire que c’est tellement mieux d’être végétarien ! Quand on doit se cogner 1h30 de transports en communs par jour, on n’a pas envie d’entendre les vélotafeurs raconter leurs exploits !

Beaucoup de “solutions écolos” sont taillées pour les centres urbains gentrifiés, où ne résident pas (ou plus) les catégories populaires. Pourtant, le renoncement peut être libératoire ! C’est toute la philosophie d’André Gorz et de Pierre Rabhi : l’éloge du suffisant et la “sobriété heureuse”.

Le souci : 90 % des messages mainstream (pub, presse de milliardaires, discours politiques, culture populaire) affirment que sobriété = privation = zéro joie de vivre = vie de merde. La low-tech (et l’écologie en général), serait un truc de peine à jouir.

Parler d’une agriculture paysanne et moins mécanisée, d’une industrie textile locale, d’une politique de réparation artisanale, d’une économie circulaire, d’emplois non-délocalisables, ça fait sourire, parfois rêver, mais la plupart des commentateurs ajoutent, moqueurs que “ceci n’est qu’une utopie”.

Tant que le plafond de verre de l’imaginaire consumériste et industrialiste ne sera pas brisé… Nous ne pourrons pas passer à l’étape suivante et entrer dans la philosophie du moins.

La révolte de la carte bleue

La low-tech représente une voie réaliste pour concilier fin du monde et fin du mois. Elle combine efficacité technique, sobriété énergétique, approche circulaire, préservation de notre planète et de notre confort.

Mais la transition implique une forme de révolte, de remise en question profonde des systèmes technologiques qui nous gouvernent “avec notre argent”. Il n’est pas question de SE priver, mais de priver ceux qui détruisent le vivant de votre argent ! Arrêtons de nourrir la bête !

Jacques Tiberi, rédacteur en chef du Low-Tech Journal (www.lowtechjournal.fr)

Crédit photo-titre : JihadALACHKAR


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