Pour la troisième année consécutive, l’association RSA38 (Réflexions pour des Solutions d’Avenir Isère) décerne un prix littéraire dans le cadre du Printemps des Talents RSA. À la question que certains se posent encore et toujours, à savoir « pourquoi une association réunissant des Personnes Allocataires du Revenu de Solidarité Active – les PARSA – passe du temps et de l’énergie à quelque chose d’aussi vain ? » , notre réponse est claire, nette et définitive : Notre liberté de penser.

Quel est le prix de la liberté, qu’elle soit sociale, politique, intellectuelle, critique, religieuse, voire amoureuse ? Pourquoi la remise d’un prix littéraire ou autre devrait-il appartenir à quelqu’un en particulier, à une caste en général ?

En 2018, c’est Yvon Le Men qui nous fait l’honneur d’étrenner notre initiative avec son livre – « En Fin de droits », aux éditions Bruno Doucey – dans lequel il ouvre le rideau qui est tiré sur la réalité de la bureaucratie de gestion du chômage et des privés d’emploi.

L’année suivante, ce sont 9 pages stupéfiantes faites de vérité et de folie, de rage et de tendresse qui nous éclatent à la figure et c’est tout naturellement Édouard Louis et son réquisitoire – « Qui a tué mon père », éditions du Seuil – qui se voit décerner notre statuette.

En cette année 2020, notre association fête ses 7 années d’existence. Alors pour l’occasion, nous nous sommes rapprochés d’une autre association « l’Archipel des Sans-Voix » pour élargir aussi bien la liste des auteurs que celle des lecteurs.

Et le résultat dépasse nos espérances : deux femmes et un homme.

Deux femmes : Isabelle Maurer avec Julia Pavlowitch-Beck pour « Je ne baisserai plus les yeux » aux éditions Les Arènes.

Témoignage coup de poing, véritable cri de rage sociale et d’amour de l’autre. Ces deux femmes nous démontrent que même si on cherche à nous enfermer, à nous parquer, à nous abîmer, à nous acculer au désespoir toujours un peu plus insidieusement, il y aura toujours des femmes comme Isabelle, mais aussi des hommes qui continueront à réinventer, malgré les fêlures, de celles et ceux qui grandissent au mauvais endroit. Ce livre est une fenêtre sur notre quotidien et il nous offre « l’idée qu’une vie meilleure est toujours possible ».

Je ne baisserai plus les yeux – Editions les Arênes

Un homme : Cled’12, dessinateur et caricaturiste.

Un homme qui utilise ses dessins et ses mots comme autant de boucliers. Ses éphémérides composées d’un dessin pour chaque jour de l’année est l’occasion de découvrir au quotidien un humour incisif qui saisit l’air du temps et les réflexions du moment. Et nous, allocataires du RSA nous n’y sommes pas absents. Cinq ans après l’attentat de Charlie Hebdo, il nous démontre qu’il ne faut jamais reculer devant la violence quelle qu’elle soit et qu’il faut toujours savoir dégainer. Ses armes sont le crayon et les mots, loin des statistiques sociales il arrive à nous donner le courage par un humour bien placé, à combattre nos douloureuses angoisses et atténuer la hantise que les vieux démons sociétaux ne viennent claquer leur mâchoire sur notre réalité quotidienne.

Nous avons un avenir puisque nous avons du talent…

Ces deux livres sont des branches auxquelles on peut se raccrocher, des épaules sur lesquelles s’appuyer. N’en déplaise à celles et ceux qui voient en nous que des sans-dents, la lèpre de la société, des invisibles…

Que l’Archipel des Sans-Voix soit ici remercié d’avoir mis à notre disposition son porte-voix et ainsi confirmer que nous avons un avenir puisque nous avons du talent.

Alain Guézou (Président de RSA 38)