11/08/2017

Le problème n’est pas de travailler.

Treize mois après mon licenciement, je pose enfin mes premiers pas dans mon CDD. Je passe des coups de téléphone, j’interagis avec des inconnus, j’écris à nouveau des articles.

Lorsqu’il y a quelques semaines, on m’a contactée pour ce contrat, ma première pensée a été « enfin un peu de pognon ! » Et juste après : « on va pouvoir un peu respirer ! ». Mais en réalité cela n’a rien changé dans mon quotidien. Même angoisse, même attente, même souffle court. Et alors que cela fait à peine quelques heures que je bosse, je me rends compte que l’air arrive à nouveau dans mes poumons. Que cette saloperie de poids sur ma poitrine s’est envolée.

Alors j’en reviens à cette curieuse idée du revenu universel. Parce que s’abrutir à courir après des boulots alimentaires (qui n’existent presque plus) nous étouffe. Si au moins on avait la possibilité de compter sur une somme d’argent, même modeste, on aurait l’esprit certainement plus libre. On pourrait s’investir ailleurs et répondre aux demandes de bénévolat qui encombrent les annonces de job et qui aujourd’hui me semblent insultantes. Puis au-delà du « travail », se sentir enfin utiles !

Rendre la majorité des gens précaires sous prétexte de rentabilité nous rend malades. Au sens strict du terme. Malades à vomir, malades à croire que notre cœur va lâcher, malades à si mal dormir la nuit… Car contrairement à une infime partie de la société, on veut juste pourvoir vivre tranquillement, sans des millions de dividendes. Juste vivre et respirer.

Le problème n’est pas de travailler. Le problème est d’exister.

De toute façon, il faut être lucide : il n’y a plus de boulot pour tout le monde. C’est mathématique.

Alors évidemment, ce n’est pas sous Jupiter que cette idée a le plus de chance de trouver du sens. Une politique dépassée, même sous les oripeaux de la jeunesse, reste une politique dépassée. Elle ne fera que précariser encore. Qu’étouffer encore.

Faudra juste que Jupiter se méfie qu’un jour – avant de rendre le dernier souffle – les malades n’aient pas un dernier sursaut d’énergie… assez pour mettre le feu au poudre.
Quitte à en crever.

(dessin du chouette Deligne)