08/08/2017

A l’occasion d’une petite bouffe avec nos grands mômes, et pour changer, on parlait boulot. Au détour de la conversation, l’un d’eux me demande : « Mais du coup, t’as quoi toi… un 10, 15, 20 ? » Sur le coup, je ne saisis pas trop de quoi il parle, puis ça percute. Ben oui, mon nombre d’heures ! Je réponds donc qu’il s’agit d’un plein temps.

Yeux ronds, comme stupéfaits, accompagnés d’une autre question : « C’est payé combien ? Un SMIC ? »

Ben non mon gamin, cette fois c’est 1.500 euros. J’en profite pour préciser toute fière que c’est la première fois de ma vie que je vais toucher une somme pareille. Même lorsque je bossais dans la Fonction publique, je ne gagnais pas autant. Enfin si, mais pour être tout à fait précise, 1.600 euros avec un supplément familial (300 euros)… au bout de 19 ans de carrière… pas de quoi parader ! Bref, rien de comparable. Et en même temps, 1.500 euros, pendant un peu plus de quatre mois, on est loin de la fortune. Pourtant j’eus en retour l’effet jackpot.

Yeux ronds, presque sidérés, avant expiration : « La vache ! »

On peut le dire de cette manière, en effet. Mais la manière sous-entend beaucoup.

Depuis que je suis au chôm’, c’est vrai, mon idée c’est quand même de dégoter cette foutue licorne à temps plein, payée disons… décemment. Et là, je me rends compte que mon minot de 26 ans n’envisage même pas une seconde qu’à l’heure actuelle :
a) On puisse bosser 35 heures
b) Qu’on puisse être payé plus de 7,52 euros (nets) de l’heure.

Mon grand âge veut que je trouve la chose anormale. Sa jeunesse impose qu’il la trouve parfaitement logique.

Alors même si à 26 ans on ne croit certes plus au père Noël, je trouve d’une tristesse infinie de ne même plus espérer obtenir des conditions de travail juste dignes.

A force de dérégulation et de nivellement vers le bas, on a fini par obtenir une génération qui accepte presque naturellement sa précarité ! Qui se résigne tout aussi tranquillement à n’être qu’un produit bas-de-gamme qui ne peut être que bradé.

Une pacotille jetable, dans la solderie permanente du marché du travail.

(dessin de Rodho qui décidément a un regard incomparable sur le chômage)